La gestion des émotions est une des problématiques que l’on aborde très bien avec la Mindfulness ou pleine conscience. Et pour illustrer le thème, voici l’extrait d’un film de science-fiction qui m’a interpellé. Il s’intitule « Equilibrium » : nous sommes projetés dans les années 2070, dans une cité du nom de Libria. Les humains ont renoncé à leurs émotions, bridées par l’absorption quotidienne de Prozium. Cette drogue anti-émotions prétend rendre les gens plus heureux car les conflits qui ont détruit l’humanité ont désormais disparu. Les humains ont donc renoncé à leur liberté de ressentir des émotions afin de vivre en harmonie… Enfin pas tous, évidement ! 😉
Ceux qui refusent d’absorber la drogue castratrice sont considérés comme transgresseurs et pourchassés par des soldats d’élite impitoyables, les ecclésiastes. Les rebelles vivent donc dans l’ombre la gestion des émotions. John Preston, qui travaille au service du « père spirituel » de Libria, est le meilleur des écclésiastes et il applique la loi à la lettre. Mais un jour, celui-ci brise le flacon de sa dose de Prozium. Il est alors submergé par … des émotions et redécouvre son humanité. En plein éveil spirituel, il se confronte à ses supérieurs hiérarchiques afin de ne pas reproduire l’erreur inhumaine qu’il a fait subir à sa propre famille…
Cet film, certes un peu musclé, met parfaitement en lumière, de façon dramatique, ce que peut être la « pleine conscience » sans bienveillance et le rôle vital des émotions dans l’humanité. On comprend mieux ce qui se passe, instant après instant, dans la conscience d’un individu coupé de ses émotions. Si vous vous intéressez à la Mindfulness, aux bienfaits de la méditation, au fonctionnement de la conscience ou à la gestion des émotions, ce film peut grandement vous éclairer sur le chemin. Regardez-le, interrogez-vous et voyez ce qui peut en sortir de bon pour vous.
3 points clefs concernant la gestion des émotions.
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Il n’y a pas de « bonnes » et de « mauvaises » émotions, juste des messagères
Comme nous avons souvent tendance à nous représenter les choses de façon très binaire, beaucoup pensent que la gestion des émotions se résume à faire taire les « mauvaises émotions » et à favoriser les « bonnes émotions ». Or, par nature, les émotions ne sont ni bonnes, ni mauvaises. Une émotion est simplement une réaction physiologique et psychologique à un stimulus ou, si vous préférez, à une situation donnée. Étymologiquement, le mot provient d’ailleurs du latin et désigne « l’action de mouvoir, le mouvement ». C’est aussi la même racine que le mot « motivation ».
Une émotion c’est donc un mouvement physio-psychologique qui délivre une information à notre attention et motive, le plus souvent inconsciemment, chacun de nos choix. La Recherche n’en est encore qu’à ses débuts et il reste encore difficile de définir avec précision ce qu’est ou ce que n’est pas une émotion. Peut-être même ni parviendrons-nous jamais. Une chose est sûre cependant : toutes les émotions sont nécessaires afin que nous puissions évaluer les évènements que nous vivons en terme de survie, de ben-être et que nous puissions donner du sens à notre vécu. Dans le cas contraire, on risquerait l’alexithymie, une maladie psychosomatique dont souffrent certaines personnes incapables, entre autres symptômes, de communiquer verbalement leurs propres émotions. Et c’est précisément le combat de John Preston, redécouvrir son humanité au-travers des émotions, quelque soient leur nature.
Les émotions agissent en effet comme des filtres au-travers desquels nous interprétons notre vécu et tirons des leçons pour l’avenir. J’ai coutume de dire que ce que nous appelons « nos souvenirs » ou notre passé, n’existe pas et n’a même jamais véritablement existé : ce qui existe, c’est la représentation sélective, distordue et généralisante que nous nous faisons d’un évènement. Certains souvenirs, comme certains rêves, nous semblent pourtant tellement vivaces que nous pourrions mettre notre main au feu qu’ils sont bien la mémoire exacte d’une situation réellement vécue. Pourtant, on sait très bien que deux personnes vivant les mêmes circonstances en auront des représentations différentes, par exemple : agréables, désagréables ou neutres. C’est à ce même casse-tête que font d’ailleurs face les forces de police en interrogeant les différents témoins d’une scène de crime, afin de dresser un portrait-robot du suspect.
Vous me direz que « les circonstances extérieures pourraient sans doute objectivement être décrites. En effet, vous répondrai-je, mais le vécu intérieur – teintée entre autres choses par nos émotions – reste définitivement subjectif ». C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons si souvent du mal à nous mettre d’accord sur les détails d’un souvenir : où étions-nous, avec qui, quel temps faisait-il, quel vêtement portions-nous, que faisions-nous et pourquoi, que s’est-il passé exactement ?… La remémoration d’une attraction, par exemple, comme un grand huit en compagnie d’une amie à la fête foraine, restera un souvenir drôle pour l’une et horrible pour l’autre. Sans doute faudra-t-il d’ailleurs recouper les deux versions pour espérer se faire une idée plus précise de « ce qui arriva réellement ce jour-là ». Bien des couples ne sont pas d’accord sur les circonstances de leur première rencontre. Et ma femme et moi ne situons pas notre premier baiser au même endroit, ni au même moment. 😉
Le vécu est subjectif. Chacun voit ce qu’il est capable de voir sous le coup d’une émotion. Et nous construisons le récit de nos souvenirs au-travers de filtres émotionnels inconscients ; au point même qu’un souvenir initialement désagréable pourra être réinterprété comme agréable et inversement. En PNL, comme dans d’autres approches, il existe même un protocole thérapeutique que l’on appelle « ré-empreinte » et dont l’objectif consiste à revisiter les évènements traumatiques de l’enfance, à constater leurs effets indésirables dans le présent et à réinterpréter le sens de ces traumas émotionnels en y associant les ressources émotionnelles acquises plus tard dans sa vie. Oui, je sais, ça peut peut sembler très occulte ! 😀 C’est en fait un processus des gestion des émotions très simples et très puissant qui permet de se réinventer dans le présent et que l’on apprend au niveau le plus avancé de la PNL.
Ce qu’il faut retenir, c’est que nos souvenirs font partie du discours personnel que nous nous racontons et que, de bien des manières, au-travers de nos émotions, nous sommes les auteurs de ce discours. Et parce que nous sommes les créateurs du discours, nous avons aussi le pouvoir de le changer à tout moment. Voici la clef : on n’efface pas l’évènement, mais on peut réinterpréter la lecture émotionnelle que nous en avons et, donc, le sens que nous donnons à notre discours. Chaque émotion a donc quelque chose à nous communiquer au sujet de notre propre expérience d’esprit incarné dans la matière. En conséquence, une bonne gestion des émotions devrait consister à traiter chacune d’elle sans la juger bonne ou mauvaise.
La bonne gestion des émotions consiste en fait à considérer toute émotion comme une invitée de marque que l’on accueille pour ce qu’elle est : une simple ambassadrice ayant pour mission de porter un message à notre attention. C’est une mauvaise gestion des émotions que de chercher à nier, à rejeter ou à ignorer le message. Cela ne peut créer, à terme, qu’un incident diplomatique entre le corps, le coeur et l’esprit. Il est donc indispensable d’apprendre à écouter ce que les émotions ont à nous révéler sur le sens de notre propre vécu. Comme nous y invite la Mindfulness, plus nous sommes capables d’accueillir et de reconnaitre nos propres ressentis pour ce qu’ils sont – de simples messagers – plus nous sommes capables de prendre la responsabilité de notre propre bonheur.
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Le règne tyrannique de la raison sur les émotions
Pour comprendre la gestion des émotions, il faut savoir qu’une émotion suit un mouvement qui, à partir d’une perception sensorielle ou extra-sensorielle, se produit d’abord de façon interne puis génère une réaction externe que l’on peut généralement observer physiquement : accélération du pouls, raideur musculaire, crispation, tremblements, agitation, fuite, agression, pâleur, rougeurs, gonflements cutanés, vocalisations. D’après les travaux de Paul Ekman, spécialiste mondialement reconnu sur ce sujet, les émotions de base sont au nombre de six : la joie, la tristesse, la peur, la colère, le dégoût et la surprise. On voit d’ailleurs très bien les cinq premières illustrées dans l’excellent dessin-animé de Pixar, Vice et Versa.
À chaque fois que nous ressentons une émotion, celle-ci porte avec elle un message qui nous indique ce que j’appelle le « vrai nord » qui, si vous me permettez la comparaison, est un peu différent du « nord géographique ». Il ne vous a sans doute pas échappé que nous pouvons toute notre vie faire des choix, suivre des directions, qui sont différentes – et parfois à l’opposé – de ce que nous indiquent la vérité de nos émotions. Toutes sortes de raisons nous poussent à agir ainsi. De mon point de vue, si nous avons tant de mal à remarquer les directions que nos émotions cherchent à nous montrer, c’est parce que notre culture et notre éducation ne nous ont généralement pas aidé à les reconnaitre, à les accepter et à les exprimer.Eh oui, la gestion des émotions ne fait pas encore partie des programmes éducatifs. 🙁 Nous avons donc plutôt été entrainé dès notre plus jeune âge à les méconnaitre, à les rejeter et à les réprimer. Autrement dit, plutôt que d’apprendre comment nous orienter dans la vie en suivant notre « nord magnétique émotionnel » – naturel et intuitif – nous avons appris à suivre un « nord géographique rationnel » – souvent superficiel et conformiste. C’est cela le règne tyrannique de la raison sur les émotions.
Et c’est exactement ce que j’expliquais hier à mon fis qui me demandait au retour d’une ballade en tête-à-tête :
« papa, pourquoi les adultes pleurent rarement ?…
– … Parce qu’il n’est pas raisonnable de manifester ses émotions en public, sauf dans certains cas extrêmes où la société l’estime normal.
– Oui, comme pour un décès c’est ça ?
– C’est ça oui. Généralement lorsqu’il s’agit d’un évènement qui touche la communauté comme une naissance, un mariage, un décès, un concert, une pièce de théâtre ou un match de foot, on admet volontiers que les émotions s’expriment publiquement. Cela parait acceptable. Mais pour toutes les situations plus personnelles, les gens pensent généralement que les émotions doivent restées privées ou contenues… Pourquoi me poses-tu cette question ?
– Oh, parce que je t’ai pas souvent vu pleurer…
– … Et qu’est-ce qui t’as fait penser à ça ?
– Chai pas… je me souviens juste d’une fois où c’est arrivé… Ça m’avait beaucoup touché de voir pleurer mon papa »…
Nous devrions sans doute apprendre à réconcilier notre raison avec nos émotions, c’est-à-dire notre tête avec notre coeur. En effet, le nord géographique n’est pas mauvais ! C’est juste qu’il ne nous conduira jamais au « coeur magnétique » de ce que nous sommes naturellement. Lorsque nous suivons le nord géographique, nous adhérons aux codes de la société à laquelle nous appartenons et, dans une certaine mesure, ceux-ci sont nécessaires pour communiquer avec les personnes qui nous entourent. Mais cette conformation ne doit pas se faire au détriment total de notre vraie nature et de la bonne gestion des émotions. Or, ce combat entre la raison et les émotions commence dès notre plus jeune âge et il a des conséquences sur notre vécu quotidien : il m’a fallu presque 40 ans pour prendre conscience des trois principales émotions qui ont modelé mon enfance et pour comprendre leurs effets sur mes humeurs : la colère, le dégoût et la tristesse. Bien qu’aimants, à n’en pas douter, ce sont ces émotions-là que mes propres parents ont inconsciemment imprimé – par leurs comportements affectifs et éducatifs – sur mon corps émotionnel. Des empreintes émotionnelles qui se transmettent de génération en génération, de façon inconsciente.
Je reconnais par exemple que je me suis moi-même surpris, il y a quelques années, à me mettre en colère lorsqu’un de mes enfants était en pleurs : « arrête de pleurer ! », lui disais-je avec véhémence 🙁 C’était plus fort que moi ! Dans mes tripes… S’ensuivait du mépris pour moi-même puis la tristesse de ne pas être à la hauteur du père que je rêvais d’être… J’étais déboussolé. Il m’a fallu du temps pour comprendre que, derrière cette réaction incontrôlée, ça n’est pas tant leurs pleurs qui me gênaient que la signification inconsciente, pour moi, de ces « pleurnicheries ». Il y avait ce que l’analyse transactionnelle intitule des « drivers« . Je pourrai résumer ainsi les choses : « si il ne sait pas contrôler ses émotions lorsqu’il a mal, cela signifie que cet enfant est trop sensible. (driver SOIS PARFAIT) ! Il est faible et il se fera marcher dessus. (driver FAIS DES EFFORTS) ! On ne doit pas pleurer. (driver SOIS FORT). Reprends-toi et arrête de pleurer. (driver FAIS PLAISIR) ». 🙁 Oui, je sais… pas très glorieux comme équation mais je me soigne 😀 😉 En fait, c’est mon héritage éducatif qui, au-travers de l’empreinte émotionnelle inconsciente, m’amenait à me comporter de façon automatique, en « mode zombie ». Et, de fait, j’étais en train d’imprimer sur le corps émotionnel de mes enfants la même empreinte inconsciente que celle dont j’avais hérité. Une sorte de label familial 🙁
Vous voyez, à chaque fois que nous tentons de nier, d’ignorer ou de rejeter une émotion, c’est comme si nous désintégrions une pièce de notre boussole intérieure, comme si nous amputions un morceau de notre propre corps émotionnel. Nous devenons alors défectueux, c’est-à-dire moins capables d’identifier le sens de notre vécu et, donc, moins capables de faire des choix qui nous conduisent – presque « magnétiquement », si j’ose dire – vers notre vrai nord. Paradoxalement, nous sommes alors comme manipulés par nos propres déséquilibres émotionnels. Nous marchons de travers et perdons notre capacité de jugement, au point de regretter nos propres réactions émotionnelles, parfois devenues incontrôlables. Mais tout ce que l’on fuit nous poursuit et nous revient en pleine figure, comme un boomerang. Lorsque cela se produit, nos émotions ne sont plus à notre service. 🙁 C’est nous qui sommes au service de quelques émotions qui nous harcèlent : la peur du rejet, la peur de de l’avenir, la tristesse ou la colère par exemple. Résultat, nous perdons le nord et nous égarons en chemin. La bonne gestion des émotions n’est plus alors qu’un voeu pieu.
La Mindfulness ou pleine conscience facilite la bonne gestion des émotions. Elle nous dispense de vivre uniquement comme des machines, à l’instar de l’ecclésiaste d’Equilibrium drogué et coupé de ses émotions, ou d’avancer dans la vie en mode zombie : c’est-à-dire comme des créatures dénuées de volonté propre. La pratique régulière de la Mindfulness permet d’apprendre à reconnaitre, accueillir et comprendre le sens caché – les messages – masqués derrière nos propres émotions. Ce faisant, nous apprenons à nous fier à nouveau aux messagers, comme à des boussoles qui nous aident à retrouver le bon sens, c’est-à-dire à nous orienter vers notre vrai nord.
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Les émotions sont au coeur de l’incarnation humaine, apprenons leur langage
Si je devais décrire les différents stades de la perception humaine – comme si l’être humain était constitué à la manière d’une fusée – les émotions constitueraient le deuxième étage, après les sensations. Pour faire simple, une fois passé le filtre des cinq sens que sont la vue, l’ouïe, le toucher, l’odorat et le goût, ce sont nos émotions qui nous indiquent la nature agréable ou désagréable, amicale ou hostile, de ce que nous vivons dans la matière. Et si nous pouvions tous apprendre dès notre plus jeune âge comment nos émotions/ressentis contribuent à renseigner notre esprit au sujet de ce qui est bon et juste pour nous, la maturité émotionnelle et spirituelle de l’humanité ferait un véritable bond. Car, à moins que nous décidions d’apprendre la bonne gestion des émotions, les émotions réprimées d’un enfant imprimeront le chemin d’un adulte qui peine à s’exprimer et à se repérer. Mais je préférerai toujours un adulte émotionnellement maladroit à une machine sans émotion. 😉
Apprendre à parler le langage des émotions, c’est en fait se préparer à reconnaitre et accueillir les messages qu’elles nous adressent à chaque instant. Ce sont des boussoles qui – lorsque nous les désintégrons – nous égarent inconsciemment sur des chemins empruntés par l’envie de plaire ou le conformisme. Mais, lorsque nous les reconnaissons et les intégrons consciemment pour ce qu’elles sont, les émotions nous mettent en mouvement vers notre vrai nord. Nous saisissons alors le sens masqué derrière nos ressentis et il devient plus aisé d’aligner la raison avec le coeur et de marcher dans la bonne direction.
Si, à la lecture de cet article sur la bonne gestion des émotions, nous pouvions juste réaliser que nous livrons d’effroyables batailles émotionnelles contre nous-mêmes, que nous discriminons inconsciemment certains de nos ressentis afin de paraitre « comme il faut » et que chacune de nos émotions est une alliée – pas un ennemi – sans doute nous sentirions-nous plus entiers, plus complets. Sans doute, aussi, auriez-vous une meilleure estime de vous, plus de confiance en vous, une plus grande capacité à vous affirmer sans vous imposer, à savoir dire non sans vous sentir coupable. Parce qu’à la fin de la journée, quelque soient votre genre, votre âge ou votre couleur de peau, nous aurons tous reçu les mêmes messagers : la joie, la colère, la tristesse, le dégoût, la peur et la surprise. Savoir reconnaitre, accueillir et décrypter ces messages est donc sans doute l’une des clés de l’éveil spirituel et certainement l’un des bienfaits de la méditation pleine conscience.
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